Réflexion

Je décide de voyager en Afrique depuis mon canapé

Combien d’auteurs africains as-tu déjà lu ? C’est la question que je me suis récemment posée, durant cette année 2020. Pourquoi est-ce que je me pose une telle question ? Je me suis rendu compte premièrement, que je ne lisais pas assez de livres. Mon record a été la lecture de 9 livres durant l’année 2019. Deuxièmement, en tant qu’ivoirienne et donc africaine, je lis très peu des auteurs de ce continent. Lorsque je discute avec mes amis français de lecture, leurs références tournent majoritairement autour d’auteurs français. Ils ont été exposés à cette littérature française dès le primaire. Il leur vient naturellement d’acheter des livres qui  leur paraissent familiers. Ceci crée cette habitude consciente ou inconsciente lors des choix des prochains ouvrages : il sera plus facile de choisir des œuvres d’auteurs qui s’inscrivent dans notre spectre géographique et culturel.

Si on suit cette logique, je devrais avoir lu naturellement assez d’auteurs ivoiriens et africains. Pourquoi ne suis-je pas satisfaite aujourd’hui ?

Avant de taper sur le système, j’ai ma part de responsabilité dans cette prise de conscience. Au collège et au lycée, je me rappelle que chaque année, deux livres étaient au programme dans le cours de français : un livre français et un livre africain. Nous disposions d’une bibliothèque fournie qui proposait des œuvres africaines et européennes. Lors des séances du cours nommé ‘’Bibliothèque’’, la bibliothécaire de l’école nous faisait découvrir en majorité des auteurs ivoiriens. J’ai ces précieux souvenirs qui trottent dans ma tête. Cependant, si je devais énumérer des œuvres lues au collège/lycée, je commencerai spontanément par citer ‘’le Cid’’ de Corneille, ‘’cinq contes’’ de Guy de Maupassant ou encore ‘’La Tulipe noire’’ d’Alexandre Dumas. Cette situation reste un problème très personnel. Mon diagnostic : je ne me suis pas assez imprégnée des œuvres d’auteurs ivoiriens que je lisais.

Aujourd’hui, je suis dans une quête de savoir. Durant cette année 2020, il s’est révélé à moi diverses informations que je ne savais pas de l’histoire de mon continent. Jamais à l’école on nous aura parlé des grands inventeurs africains, des pyramides d’Égypte, des magnifiques universités telles que celle de Sankoré de Tombouctou au Mali. Lorsque le continent africain était évoqué en cours d’histoire, ce n’était pour parler en majorité que de la colonisation et de l’esclavage. Ensuite on basculait sur la révolution industrielle en Occident. Paradoxale, non ?

Le constat de cette situation est pesant : je ne connais pas assez mon pays, je ne connais pas assez mon continent. Je ne sais rien de l’histoire de la Namibie, du Kenya, des peuples au Burkina Faso, des difficultés d’un citoyen lambda en Guinée, des succès au Cap-Vert. L’idéal aurait été de voyager, faire un tour de l’Afrique et découvrir ces différentes nations, ces différents peuples. C’est dans ma Bucket List. En attendant que je récolte assez de fond pour entamer ce projet, je décide de voyager autrement depuis mon canapé : à travers des livres.

Qui serait mieux placé qu’un Malien qui vit au quotidien chez lui pour m’expliquer comment ça se passe dans son pays ? Qui serait mieux placé qu’un Abidjanais pour me montrer les meilleurs restaurants de la capitale économique de la Côte d’Ivoire ? J’applique ce même raisonnement aux livres. Si je veux découvrir l’Afrique autrement, différente de celle qui nous est montrée en permanence à la télévision c’est-à-dire une Afrique pauvre, sans histoire, qui a eu besoin d’être ‘’civilisée’’, vers qui d’autre puis-je me diriger à part des auteurs africains ? Ceux-là même qui auront grandi sur ce continent et pourront aborder les problèmes vécus par les populations, parler de la richesse de leurs villes, régions, contrées et d’évènements historiques qui se sont produits dans leur pays vu de l’intérieur.

Les œuvres de l’Ivoirien Isaïe Biton Koulibaly sur l’amour représentent une réelle révolution. La pudeur parfois hypocrite, rend tabou tout sujet autour des relations amoureuses. Si on n’en parle pas, comment on s’y prend, comment on s’y prépare ? Le romantisme en Italie ne peut se manifester de la même manière qu’en Côte d’Ivoire. Et ce n’est pas parce qu’un homme n’offre pas de rose à sa femme qu’il n’est pas romantique. Biton a su parfaitement, dans un contexte purement ivoirien décrire les attentes et comportements d’une femme et d’un homme ivoirien à travers ses ouvrages ‘’Ah les femmes’’ et ‘’Ah les hommes’’. Comment pouvons-nous réellement connaitre l’existence du phénomène des enfants qui vivent dans la rue dans nos pays si ce n’est parce qu’on y a été confronté, parce qu’on l’a observé ? C’est la mission que s’est choisie Sylvain KEAN ZOH dans ‘’ La voie de ma rue’’. Cette œuvre percutante raconte l’histoire de ces enfants marginalisés très mal vus par la société, qui n’ont pourtant pas choisi de faire de la rue leur demeure. Certaines vérités sont universelles. Mais leur universalité ne les prive pas d’une méthode précise à adopter en fonction du cadre culturel dans lequel on se situe. Ricardo Kaniama le démontre bien dans ‘’La chèvre de ma mère’’.  Le self-made man millionnaire y expose les principes de l’intelligence financière. Ce sujet est traité d’une manière très simple afin de favoriser la compréhension immédiate des différents principes énoncés. De plus, la force principale de ce livre est d’évoquer les problèmes propres aux Africains en général qui entravent leur enrichissement.

À la suite de ce diagnostic, découle mon initiative de lancer ce blog : Afrolecture. Mon blog se veut être un voyage dans lequel je dévoile mes lectures des œuvres écrites par des auteurs africains. Ce blog a pour but de m’encourager à adopter un rythme de lecture régulier et de partager mes trouvailles aux personnes se trouvant dans la même situation que moi ainsi qu’aux curieux. Mon objectif est de créer un espace de partage dans lequel nous pourrions discuter, échanger, se proposer mutuellement des lectures et s’élever ensemble dans ce fabuleux voyage. 

À vos livres, prêts, lisez !

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